Bourse
d'étude Rameau |
08/2006 |
Rameau
et son théâtre lyrique
Rameau
en ordre libre : mises et remises de l'oeuvre
Rémy-Michel
Trotier
Le « Jeudi
premier Octobre 1733 », l’Opéra de Paris présentait au
Théâtre du Palais-Royal la première tragédie en musique de
Jean-Philippe Rameau,
Hippolyte et Aricie ; pour un compositeur, cette mise
au théâtre par l’Académie Royale de Musique consacrait la
qualité de l’œuvre. Entre l’institution, qui détenait le
privilège de représentation de l’opéra dans la capitale
française, et le débutant Rameau, commençait une relation qui
durerait jusqu’à la mort du musicien en 1764. Avec un livret
conçu par Simon-Joseph Pellegrin et qui devait beaucoup au XVIIe
siècle, Rameau, au moment de faire ses preuves à l’Académie
Royale de Musique, sut montrer le respect attendu envers l’opéra
hérité du siècle de Louis XIV ; son œuvre à venir, au
contraire, abolirait les limites de cette filiation. Des différents
genres lyriques, il n’en est pas un auquel le compositeur ne
se soit par la suite essayé. A côté des quatre tragédies,
on compte en effet huit opéras ballets
– parmi lesquels cinq héroïques
et un bouffon – et trois actes de
ballets autonomes, six opéras-comiques,
cinq participations à des fragments,
trois pastorales dont
deux héroïques, deux
comédies-ballets, un intermède
en musique, un opéra
pour la paix, un divertissement
et une fête…
Rameau, au gré de ces explorations formelles, a su, mieux que
tout autre, faire exister ses conceptions originales du drame
musical dans les conditions de représentations qui lui ont été
offertes. Cette acclimatation permanente de l’inspiration aux
circonstances conduisit Rameau à porter à son avantage un
processus permanent à son époque : celui de la remise au
théâtre des œuvres, qui, au XVIIIe siècle,
n’est jamais une reprise à l’identique du texte musical. Il
faut admettre la remise au théâtre comme un chantier créatif
à part entière ; sous cette hypothèse, l’examen
analytique de l’œuvre lyrique éclaire une pratique qui, si
elle semble aléatoire au premier regard, n’en révèle pas
moins des constantes dans les motivations. [...]
|